Européennes : des Verts et désamours

La particularité de l’élection européenne est la multiplicité des niveaux auxquels elle peut être lue. Au niveau européen, tout d’abord, puisque l’assemblée qui vient d’être élue dépasse très largement notre frontière française. Et puis au niveau national, au niveau « régional » (puisque le scrutin français est découpé en 8 grandes circonscriptions), au niveau départemental et enfin au niveau municipal. Certains experts iront jusqu’à analyser le résultat bureau par bureau – et après tout, pourquoi pas, même européenne, une élection est aussi un travail de terrain pour les forces politiques qui s’affrontent (j’en profite pour signaler que Cannabis sans frontières n’a pas daigné m’apporter ni tract ni échantillon gratuit dans ma boîte aux lettres, quelle campagne pathétique !).

Ben pas de chance cette fois-ci parce que quel que soit le niveau observé, les résultats ne sont pas très réjouissants pour le militant socialiste que je suis (mince, je crois que j’ai lâché un scoop !).

La nouvelle assemblée européenne

Commençons par le plus important. Au niveau européen, c’est globalement une progression des forces de droite. Certes, cette situation est, peu ou prou, la résultante de situations nationales disparates mais la macro-analyse (je ne suis pas assez spécialiste pour vous présenter quelque chose de plus étayé) montre que, généralement, la droite au pouvoir n’est pas sanctionnée, au contraire (Pologne, Allemagne, Italie, …) alors que la gauche au pouvoir l’est plus ou moins virulemment (Angleterre, Espagne…). Il y a des exceptions, comme en Suède ou en Grèce mais au finale, les principales coalitions de droite européennes (Parti Populaire Européen et Démocrates Européens) auront une confortable avance sur les coalitions de gauche/centre gauche. Il est vrai que le mode de fonctionnement très spécifique des institutions européennes fait que cette simple grille de lecture gauche vs. droite n’est pas suffisante pour analyser chaque vote (gauche et droite pouvant défendre ensemble des intérêts nationaux, etc.), il n’empêche qu’entre une Europe plus sociale et une Europe plus économiquement libérale, le choix a été fait. Continuer la lecture de « Européennes : des Verts et désamours »

La gauche, la droite, le PS, le MoDem

On entend beaucoup de choses en ce moment, à l’occasion du très prochain congrès du Parti Socialiste [NB : l’essentiel de cet article a été rédigé avant le congrès, même si la touche finale a été apportée ce dimanche], concernant la stratégie d’alliance (l’alliance avec le MoDem serait portée par la motion de Royal et bannie par les autres).

Discours simplificateur à l’extrême. Discours brouillé par tous, avec des arguments avancés (par exemple, Vincent Peillon, soutien de la motion de Ségolène Royal, indique que l’alliance avec le MoDem n’est pas à l’ordre du jour puisque le MoDem n’a pas encore choisi entre la gauche et la droite – comme s’il allait le faire bientôt !) qui ne correspondent pas toujours à la réalité des positions.

Il y a une vérité, c’est que ce sujet divise profondément les militants et que ce sera (si le PS survit au congrès ;-) l’occasion de nouveaux affrontements internes fratricides comme le débat sur le référendum européen l’avait déjà été. J’ai entendu à Colombes des camarades s’exprimer en se disant plus proches du MoDem que du PC. D’autres prendre le contrepied, voyant dans cette dérive droitière la perte de notre identité socialiste (sous-entendu au profit d’une identité sociale-démocrate). Ceci pour l’échelon local. Mais au niveau national, on a entendu, notamment l’année dernière à l’occasion des Présidentielles, plusieurs ténors (Royal, Cohn-Bendit, Rocard et j’en passe…) envisageant, voire appelant de leur vœu, une alliance PS-MoDem.

Ce sujet de division, comme les autres, ne doit pas être tabou. Il provoquera sans doute des départs du PS, pour ceux qui estiment que le parti ne va pas dans le bon sens (le PS colombien a d’ailleurs vécu le départ de certains vers une gauche plus radicale et d’autres vers le MoDem, comme quoi il est difficile de contenter tout le monde !!!), au fur et à mesure de l’évolution de la « ligne du parti » sur ce point.

Et puis il y a les pratiques, empreintes de pragmatisme ! À Colombes, une « union de la gauche » façon « majorité plurielle » (PS + Verts + PC) a été la stratégie assumée dès le premier tour et s’est avérée gagnante. À Asnières, une union PS + MoDem au deuxième tour a permis un rassemblement démocrate pour barrer la route à une droite indigne. La motion D portée par Martine Aubry clame haut et fort « À gauche ! », mais à Lille, la même Martine Aubry travaille en bonne intelligence avec le MoDem.
Je pourrais multiplier les exemples mais le constat est là : pour des raisons de stratégie, peu chahutées par les médias avides de simplification, le sujet paraît central dans les tractations actuelles en vue du congrès alors qu’il ne l’est pas. Parce que s’il l’était, on aurait depuis longtemps une alliance Delanoë-Aubry-Royal (qui ne considèrent pas le MoDem comme un ennemi définitif) contre Hamon (MoDemKraft, Nein Danke !).

[Suite au congrès…]

La synthèse n’a pas eu lieu à Reims, car s’il y avait, je pense, matière à réunir une majorité sur l’orientation politique du PS, avec les 80 % des motions A, D et E, il n’y a pas eu de facto possibilité de constituer une autre majorité. La motion Royal a été incapable de réunir le moindre consensus autour d’elle (hormis les 1,5 % anecdotique de la motion B), et le « front anti-Ségolène » n’a pas su se constituer, probablement (mais je n’observais ça que d’un œil lointain) à cause d’egos trop gonflés incapables de s’effacer devant l’intérêt (supposé) collectif. D’après moi, Delanoë porte, à cet égard, une lourde responsabilité dans la stérilité de ce congrès. Aubry, quant à elle, peut assez dignement poursuivre sa campagne en continuant de relayer le point central de sa motion : le rassemblement. Et quel que soit le résultat à l’issue des scrutins des 20 et 21 novembre (car je doute qu’une majorité absolue surgisse dès le premier tour), le PS aura du boulot pour retrouver sa cohésion, et, plus important encore, sa crédibilité et son audibilité auprès des Français, car le fonctionnement interne du parti, c’est peut-être passionnant, ou affligeant, selon le point de vue, mais ça ne concerne que le petit cercle des militants.

Parlons encore un peu du MoDem. Je ne sais pas trop sur quoi table François Bayrou. Est-il tellement optimiste qu’il parie sur un effondrement du PS dont tous les déçus qui ne se sentent pas tentés par l’ultragauche (pour reprendre l’expression à la mode du moment !) le rejoindrait ??? En tout cas, comme ceux de l’UMP (c’est de bonne guerre), il moque la stérilité actuelle du PS qui n’aura donc toujours pas tranché la question de l’alliance avec le MoDem, mais lui, de son côté, s’est-il prononcé sur ce qu’il souhaiterait ? Pense-t-il obtenir des majorités sans alliance ?!

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