Moment civique, moment politique

Les jours d’élection ont toujours été, pour moi, des moments à part, intenses, importants. Probablement, certainement même, l’engagement de mes parents y est pour quelque chose. Je ne sais plus à quel âge j’ai commencé à accompagner ma mère ou mon père au bureau de vote, observant le protocole, la remise de l’enveloppe, les bulletins de vote, le passage dans l’isoloir et le résonnant « A voté ! » qui ponctue le cérémonial, tout cela m’excitait et j’attendais avec impatience le moment où, à mon tour, j’allais pouvoir passer dans l’isoloir pour accomplir mon « devoir civique ». Je n’ai jamais raté une élection, votant quand je le pouvais, établissant une procuration dans le cas contraire.

Ma défiance vis-à-vis du vote électronique, je la dois certes à ma qualité d’ingénieur informaticien, qui sait combien il est facile de détourner un programme (même si le logiciel des machines à voter est protégé par de nombreux dispositifs, même si le vote papier ne prémunit pas non plus de la fraude), mais je la dois aussi à mon attachement presque fétichiste à ces enveloppes remplies de bulletins. Mon premier vote s’est suivi, quelques heures plus tard, de mon premier dépouillement occupé, comme scrutateur, à ouvrir les enveloppes, déplier des bulletins, énoncer le nom du candidat ou de la liste, dessiner les petits bâtons correspondants, les décompter, les recompter, les totaliser, les pourcentiser, tandis qu’autour de nous bruissaient les estimations glanées à la radio ou à la télévision (je suis un vieux croûton : du temps de mes premiers suffrages, le téléphone portable n’existait pas encore. Désormais, on connaît parfois les résultats avant même d’avoir ouvert la première enveloppe). Après quoi, tout le monde fonçait à la mairie pour connaître les résultats de la ville entière. Continuer la lecture de « Moment civique, moment politique »

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